mardi 22 mai 2007

La naissance de l'homme-singe.

Le réveil sur la table de nuit indique 3h11. Woody Welles se réveille en sursaut d’un cauchemar interminable. C’est un homme d’à peine vingt-cinq ans, carrure athlétique, barbe de trois jours, de longs cheveux noirs. Le regard vide, il essuie d’un revers de main la sueur qui lui coule dans les yeux et tente de reprendre son souffle. La sirène d’une voiture de police qui file dans la nuit le ramène à la réalité.
Il se lève de son lit. En partie à cause des draps trempés de sueur, mais avant tout pour faire passer ces étranges courbatures. Il fait quelques mouvements d’épaules et se masse la nuque puis se colle le front à la fenêtre pour tenter de faire descendre la température de son corps. La ruelle est calme. Seul un chat joue avec une bouteille en verre qui roule sur le pavé. Au loin scintillent les lumières des gratte-ciels d’Utopolis, ceux que Woody aimerait habiter s’il avait les moyens de s’offrir autre chose que cette minable chambre meublée en banlieue. Il se dirige vers son paquet de cigarettes posé sur la commode, en allume une. Il s’étire pour faire craquer ses vertèbres endolories. Un long soupir s’échappe de sa bouche, accompagné d’une épaisse volute de fumée.
Woody fait quelques pas et va se placer devant le miroir en pied pour observer sa posture. Pas de doute, son dos s’est voûté. A tel point que ses épaules tombent en avant et qu’il ne parvient plus à redresser complètement la tête. Cette vision l’amuse. Il rit. Il rit tant et si bien qu’il se met bientôt à tousser, faisant tomber la cendre brûlante de sa cigarette sur son torse. Merde ! Il balaie son torse de la main et recule d’un pas pour faire tomber la cendre par terre et… hurle de douleur ! Son pied vient d’écraser quelque chose qui provoque en lui comme une décharge électrique. Comprenez bien : il ne s’agit pas de son pied dans lequel se serait enfoncé un objet contondant, non, mais d’une partie de son corps que son pied vient d’écraser. Woody jurerait s’être déplacé une vertèbre. Instinctivement, il porte la main au-dessus de son coccyx pour masser et estomper sa douleur. Il pousse un cri d’horreur. Un bout de chair pend, part du bas de son dos jusqu’à toucher le sol. Il se retourne pour vérifier dans le miroir et pousse un nouveau cri. Une queue de singe ! Il crie à nouveau. Son nouveau membre vient de remuer tout seul. D’une main fébrile, Woody tente de le toucher, lorsque celui-ci se rétracte et disparaît dans son dos. Sa vue se trouble, il transpire abondamment, respire avec difficulté et chancelle. Il se dirige vers la porte de sa chambre pour l’ouvrir mais celle-ci reste close. Il s’acharne. Pas moyen. Alors il revient à la fenêtre, tente de la soulever. Rien ne bouge. Essoufflé, il se laisse retomber sur son bureau et jette un dernier coup d’œil par la fenêtre : la pluie fouette le carreau et rend floue la vision du paysage. Néanmoins, il semble que les lumières des gratte-ciels s’éteignent une à une jusqu’à l’obscurité la plus totale. Woody s’évanouit et s’écroule au sol.

Ainsi commence l’histoire de Woody Welles.

Aucun commentaire: